Que risque Christophe Galtier après les fuites de mails à l’OGC Nice ? Un avocat spécialisé nous répond

Christophe Galtier est dans l'oeil du cyclone après les révélations sur son passage à l'OGC Nice
Christophe Galtier est dans l'oeil du cyclone après les révélations sur son passage à l'OGC Nice / Jean Catuffe/GettyImages
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Empêtré dans un énorme scandale à la suite de révélations de Romain Molina et RMC Sport, Christophe Galtier fait l’objet de nombreuses critiques. Mais que risque vraiment le manager du PSG ?

Lors de sa période sur le banc de l’OGC Nice (2021-2022), l’actuel manager du Paris Saint-Germain Christophe Galtier aurait notamment demandé le départ de certains joueurs sur la base de leur couleur de peau et de leur religion, tout en refusant, selon les informations de Romain Molina et de RMC Sport, le recrutement de joueurs pratiquant le ramadan. 

De graves accusations qui soulèvent bon nombre de questions, auxquelles à répondu pour 90min l’avocat au Barreau de Paris Elie Dottelonde. Entre potentiel départ du PSG, poursuites judiciaires ou contre-attaque pour diffamation, le point sur l’affaire Galtier.

Que risque vraiment Christophe Galtier après la fuite de mails à l’OGC Nice ?

Elie Dottelonde - Il y a éventuellement deux infractions qui pourraient être constituées par les propos contenus
dans le mail. La première serait l’injure à caractère raciste non publique et la deuxième serait la
discrimination à caractère raciste.

L’injure à caractère raciste est constituée par une expression outrageante ou un terme de
mépris envers une ou plusieurs personnes, identifiée ou identifiable. Cela pourrait être le cas si
Christophe Galtier a affirmé « on ne peut pas avoir autant de noirs et de musulmans dans
l’équipe ».

Cela pourrait être également le cas des propos tenus par son fils “il n’y a que des noirs ici, la
moitié va à la mosquée le vendredi”.

Toutefois, au niveau de la preuve, des propos rapportés dans un mail risquent d’être jugés
insuffisants pour caractériser l’infraction et donc engager la responsabilité de Christophe
Galtier. Pour cela, il faudrait d’autres éléments qui établissent qu’il ait effectivement tenu de tels
propos, à l’instar de son fils.

La peine maximale encourue pour injure non publique raciste est une amende de 1.500 euros.
Quant à la discrimination à caractère raciste, elle est constituée par un traitement à la défaveur
de l’individu qui ne peut se justifier uniquement par sa couleur de peau ou ses convictions
religieuse.

Tout comme l’injure, la responsabilité de Christophe Galtier ne pourra être engagée qu’à
condition de prouver qu’il n’a pas fait jouer un joueur ou pas recruté un joueur en raison de sa
couleur de peau ou de sa religion. Des propos rapportés dans un mail sont insuffisants.
La peine maximale encourue pour discrimination raciale est une peine d’emprisonnement de 3
ans et 45.000 euros d’amende.

Un autre exemple cité, c’est celui de Bilal Brahimi, qui aurait été écarté en raison de son jeûne lors du Ramadan…

E. D - A nouveau, la discrimination à caractère raciste n’est constituée que si le traitement de défaveur résulte d’une appartenance ethnique ou religieuse.

La difficulté ici réside dans la preuve d’une telle discrimination : la direction sportive pourrait
affirmer avoir justifié son choix pour des raisons sportives ou tactiques.

Aussi choquant qu’une telle situation puisse paraître, il est nécessaire d’avoir des preuves
supplémentaires pour rentrer en voie de condamnation.

Et un autre problème qui pourrait se poser, ce serait l’origine du mail en question…

E. D - Effectivement, on ne connaît pas trop les conditions dans lesquelles les journalistes ont eu
accès à ce mail. On se doute que Julien Fournier et Christophe Galtier ne s'apprécient pas.

Alors, ça veut pas dire que ce que dit Julien Fournier n'est pas vrai, mais il y a un contexte qui
fait que, en l'état, ça me semble un peu léger.

Il est toutefois parfaitement envisageable qu'une enquête soit ouverte pour déterminer s'il y a eu des infractions à caractère raciste.

Est-ce que Christophe Galtier peut être renvoyé du PSG après les révélations de Romain Molina et RMC Sport sur son passif à Nice ? 

E. D - D'un point de vue juridique, ça me semble un peu précipité. Après, pour des questions
notamment de communication et vu que les résultats sportifs ne sont pas optimaux, ils peuvent
se dire : « Ça fait beaucoup. »

Mais là, juridiquement, ça me semble un peu compliqué de le virer uniquement sur la base,
encore une fois, d'un mail qui a fuité, on ne sait pas dans quelles conditions. Et ce n’est même
pas comme si on savait qu'une enquête avait été diligentée.

S’il venait à être renvoyé sur la base d'un mail, encore une fois, qui a fuité d'on ne sait où, via un personnage dont on sait qu'il ne s'apprécient pas, c'est un peu léger et cela pourrait se régler
aux prud'hommes.

Comment Christophe Galtier peut, lui, se défendre face à ces accusations ?

E. D - Il pourrait attaquer en diffamation en affirmant qu’on lui impute des propos faux qui portent
atteinte à son honneur.

A ce moment-là, que peut-il se passer pour Julien Fournier, pour Romain Molina et RMC Sport si justement il y a preuve qu'ils ont diffamé ?

E. D - Julien Fournier, pour l'instant, on n'a aucun élément sur sa participation ou pas à cette affaire.
Ensuite, à partir du moment où on diffuse ce genre d'éléments, on est responsable... Quand on
est un journal - ou journaliste pour Romain Molina - on est responsable de
ce qu'on divulgue comme information.

À partir du moment où tout ça a été divulgué, il y a la possibilité de voir sa responsabilité engagée. Ça ne veut pas dire que l’infraction est constituée, mais pour connaître un petit peu les journalistes de RMC, je sais qu'ils sont assez sérieux pour, je pense, éviter de divulguer des éléments de manière trop hâtive. Alors, encore une fois, ça ne veut pas dire qu'ils ont raison, mais je sais que c'est une maison assez sérieuse en tout cas.

Est-ce que la FFF risque quoi que ce soit pour son interdiction de rompre le jeûne pendant les matchs lors du ramadan en France ?

E. D - À partir du moment où on est organisateur d'une compétition, on a le droit d'y fixer des règles.
C'est une chose de dire “il n'y a aucun joueur qui jeûne pendant le Ramadan qui peut jouer” que
de dire “on ne va pas arrêter le match pour qu'il y ait une rupture du jeûne.”

Un organisateur de tournoi a le droit de dire : “On ne va pas arrêter un match pour des raisons
religieuses, quelles qu'elles soient, que ce soit musulman, catholique ou juif.

Est ce qu'un joueur peut être écarté d'un club parce qu'il jeûne pendant le Ramadan ?

E. D - Encore une fois, la discrimination raciale, c'est de dire : “Vous avez un traitement en votre
défaveur uniquement pour des questions de religion.”

Dans le cas d’Antoine Kombouaré, il faudrait qu'il y ait notamment, par exemple, une baisse
d'intensité lors des entraînements. Et là, un entraîneur a aussi un pouvoir de direction, comme
une sorte de gérant de société. Et donc, il peut dire : “Là, vous êtes moins performants parce que, de manière totalement légitime, vous décidez de jeûner. Mais moi, j'ai le droit aussi de vous écarter.

Mais si un joueur est tout aussi performant, voire plus performant, dans ces cas-là, il n'a aucune
raison d'être écarté, à part si bien sûr, ça peut se justifier pour des raisons tactiques. Et si le joueur ne joue pas uniquement pour des raisons religieuses, là, ça devient plus problématique. Mais encore une fois, il faudrait apporter la preuve que cela soit basé uniquement sur la religion et pas sur une éventuelle baisse des qualités physiques du joueur ou sur un simple choix tactique. La difficulté réside à nouveau dans la preuve.

Encore une fois, pour être clair, il faut que ça puisse se justifier uniquement par des conditions
de religion. Si on peut justifier par autre chose, dans ces cas là, ce n'est pas une discrimination
à caractère raciste.

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