Interview Exclusive : Jessica Houara-d'Hommeaux explique le son rôle de consultante avant l'Euro 2022 (Partie 1)

Jessica Houara-d'Hommeaux sera présente avec Canal + pour l'Euro 2022
Jessica Houara-d'Hommeaux sera présente avec Canal + pour l'Euro 2022 /
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L'Euro 2022 approche à grand pas ! Et avant l'entame de la compétition, Jessica Houara-d'Hommeaux a accepté de nous accorder un long entretien. Déjà présente pour la Coupe du Monde 2019, l'ex-internationale tricolore (64 sélections) sera encore sur Canal + pour l'événement footballistique de l'été. Dans cette première partie, celle qui a notamment porté le maillot du PSG et de l'OL est revenue sur sa carrière de consultante.


Quel sera votre rôle sur Canal + tout au long de cet Euro 2022 ?

Je vais avoir deux rôles. Tout d'abord, je vais commenter tous les matches de l'Allemagne, avec Anne-Laure Salvatico. Les trois matches du premier tour et un potentiel quart de finale. Et je serai également en plateau pour tous les matches des Bleues, mais aussi une demi-finale et la finale. Ce sont les deux rôles que j'ai au cours de la saison. Je fais du commentaire et de l'analyse en plateau. Ça sera la même chose cet été !

Depuis 2017, vous exercez en tant que consultante. Qu'est-ce que vous appréciez tout particulièrement dans ce nouveau rôle ?

Ce que j'aime, c'est parler de football. Tout simplement ! Ma passion, c'est le football. J'ai eu la chance d'en faire mon métier en tant que joueuse. Et je continue de le faire en tant que consultante. J'ai la chance de vivre de ma passion. Je peux continuer à parler football, à vivre football. Je n'ai pas du tout l'ambition, à l'heure actuelle, d'entraîner. Je ne sais pas si ça viendra dans le futur. De pouvoir continuer à faire ce métier, ça me permet de garder un pied dans le football.

J'aime l'idée de tout ce qui est analyse technique, les vidéos, les palettes... Ce métier me permet donc de continuer à faire ça. Avec Canal +, j'ai aussi l'avantage de faire le Canal Sports Club. Une émission qui me permet de toucher à tous les sports. C'est important pour moi. Je peux développer mes compétences dans d'autres domaines que le football.

Je suis obligée de faire des recherches, de regarder ce qu'il se passe et maintenant, je peux parler de Formule 1, de Moto GP... Donc tout ça me permet d'être dans le sport, tout simplement. Et c'est ce que j'aime essentiellement dans ce métier.

Est-ce que c'était un objectif de se spécialiser dans d'autres sports que le football ?

Ce n'était pas un objectif premier. À la base, je pensais au football, parce que c'est le domaine que je connais le mieux. Au final, je me suis vraiment prise au jeu avec le Canal Sports Club. J'ai vraiment apprécié ce domaine-là. Le fait de pouvoir transposer ce que moi j'ai vécu, en tant que footballeuse dans mon sport, à d'autres sports. Faire des parallèles entre tous les sports.

On se rend compte que l'on vit quasiment tous la même chose. Toutes ces choses-là m'intéressent énormément. Je peux aussi apprendre d'autres sports. J'aime les autres sports, mais m'intéresser un peu plus précisément à ces autres sports-là, c'est quelque chose que j'aime au final. Ça m'enrichit aussi personnellement.

Et ça vous donne un peu plus de travail...

Un petit peu. En même temps, c'est tellement enrichissant que ça en vaut la chandelle. Ça reste une passion ! On va dire qu'il y a pire comme métier (rires).

"Hélas sur le foot féminin, on n'a pas beaucoup de données."

Jessica Houara-d'Hommeaux

Vous avez déjà pu disputer l'Euro et la Coupe du Monde en tant que joueuse. Comment est-ce qu'on aborde une telle compétition dans ce nouveau rôle ?

C'est pas du tout la même pression pour être honnête (rires). Quand on est une joueuse, on a une pression du résultat. C'est une préparation très intensive sur le terrain. Ce n'est pas la même chose. Bien évidemment, qu'il faut se préparer en tant que consultante. Là je vais faire le groupe de l'Allemagne, il va falloir que je fasse un travail de recherche sur les joueuses allemandes et toutes les équipes qu'elles vont rencontrer. Il y a un travail de recherche.

En même temps on l'aborde différemment, moi c'est un plaisir d'être sur un plateau. C'était un plaisir de jouer au football, bien évidemment. Mais c'est quelque chose de complètement différent. Parce que le résultat ne vient pas de ma performance. Il faut que je sois bonne dans ce que je dis aux commentaires et bonne dans ce que je dis en plateau, que je sois pointue. Mais un résultat d'équipe, c'est vraiment très important, donc ce sont deux choses assez distinctes. En même temps c'est une préparation, mais ce n'est pas une préparation physique. C'est une préparation intellectuelle. Il faut connaître son sujet.

Et justement, comment allez-vous préparer cet Euro 2022 ?

Je vais devoir faire beaucoup de recherches sur Internet. Et c'est difficile parce qu'hélas sur le foot féminin, on n'a pas beaucoup de données. Je le vois déjà quand je fais mes recherches au quotidien, pour les matchs de D1, avec des joueuses qui viennent d'arriver. J'ai beaucoup de difficulté à trouver des choses sur ces joueuses-là.

C'est un gros travail. Il va surtout falloir connaître les clubs où elles ont joué, le nombre de sélections qu'elles ont etc... Après, l'analyse des matches, c'est difficile, parce qu'il est quasi impossible de trouver les images. L'avantage, c'est comme je vais suivre l'Allemagne, au fur et à mesure de la compétition, je vais avoir l'habitude de les voir jouer et ça, c'est un très gros avantage.

Les autres équipes, ça va se faire au fil de la compétition. Je vais essayer de regarder les résultats, de m'intéresser au résumé du match etc... Mais c'est difficile de tout regarder. Ça va surtout être un gros travail de recherches Internet pour essayer de trouver le maximum d'informations sur chaque joueuse et sur chaque nation. Il va y avoir beaucoup de recherches et beaucoup de temps passé sur l'ordinateur.

Jessica Houara-d'Hommeaux
Jessica Houara-d'Hommeaux était présente pour la Coupe du Monde 2019. / Jean Catuffe/GettyImages

Il est certain qu'au fil de la compétition, cela sera de plus en plus simple...

Oui forcément. Déjà, on aura de plus en plus de temps entre les matches. Au début, c'est très très chargé. C'est très dense en terme de planning. Surtout que je vais faire des allers-retours entre l'Angleterre et la France. Comme chaque grosse compétition, au fur et à mesure, ça s'étale un peu, on a un peu plus de temps et puis on a l'habitude de voir les équipes jouer et du coup on sait la dynamique dans laquelle elles sont.

Là, on peut se dire, l'Allemagne joue comme ça et au final, elles vont jouer complètement différemment à l'Euro. Les joueuses vont être dans une dynamique différente. Il y a des joueuses qui vont se révéler à cet Euro-là et qui vont enchaîner les matches, alors qu'avant elles ne jouaient pas. Une compétition comme ça, c'est tellement particulier.

Est-ce que vous préférez exercer pour ces grandes compétitions ? Ou plutôt durant les week-ends de championnat ?

Il y a beaucoup d'adrénaline. En tant que joueuse, je préfère les grandes compétitions. En tant que consultante, je préfère quand même toute la saison. Parce que là, on n'a même pas le temps de voir tous les matches, c'est impossible. On est sur beaucoup de voyages, en très peu de temps. On est dans la compétition forcément, mais comme je vais faire des allers-retours entre l'Angleterre et la France, je vais être moins dedans.

Durant la saison, c'est beaucoup plus facile d'être imprégné. Là, je vais être dedans oui, mais pour des matches et pas pour tous les matches. C'est un peu plus difficile, c'est un peu plus intense. Je préfère la saison en tant que consultante, par contre je préfère totalement les grosses compétitions comme ça quand j'étais joueuse. On joue tous les trois jours, nous on a envie de jouer quand on est joueur et joueuse. On a notre dose de foot au maximum.

"L'atout, c'est qu'on peut savoir ce que les joueuses ressentent."

La consultante de Canal +

Vous étiez déjà présente pour la Coupe du Monde 2019, qu'est-ce qui va changer pour votre deuxième grande compétition dans le monde des médias ?

Les premières années en tant que consultante, j'avais beaucoup plus de pression, pour les matches. Maintenant, commenter un match, je sais ce que c'est, j'ai l'habitude. À la Coupe du Monde, en plus, j'avais un rôle de bord de terrain, c'était différent. J'avais eu l'habitude de le faire un petit peu en D1, mais ça reste quand même un vrai métier de journaliste. Du coup, j'avais un peu plus de pression, parce qu'il faut savoir enchaîner les questions etc...

C'est un métier que moi je ne connais pas. Ce n'était pas facile. Après, ce sont des joueuses que je connaissais, donc c'était aussi peut-être un peu plus facile pour moi. Mais j'avais peut-être un peu plus de pression dans ce rôle-là, de bord terrain de l'Équipe de France, parce que ce n'était pas un métier que je maîtrisais totalement. Là en tant que consultante, commenter un match, analyser un match des Bleues, c'est quelque chose que j'ai l'habitude de faire. Et donc du coup, j'aurai beaucoup moins de pression, forcément, que j'ai eu pour la Coupe du Monde.

Préférez-vous analyser ou commenter les matches ?

J'aime les deux. Très clairement, j'ai besoin des deux. Et j'aime les deux parce que j'aime être proche du terrain et commenter, parler pendant le match. J'aime aussi avoir ce recul-là sur les matches et juste avoir cette petite analyse d'un ensemble. J'aime les deux et je trouve que les deux se complètent bien. Et je ne peux pas choisir entre les deux, parce que j'ai besoin des deux pour être totalement satisfaite dans mon travail.

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Jessica Houara-d'Hommeaux en a disputé des matches avec les Bleues. / NICHOLAS KAMM/GettyImages

En quoi votre passé international peut être un énorme atout dans l'analyse des matches de cet Euro ?

L'atout, c'est qu'on peut savoir ce que les joueuses ressentent. C'est important sur ce genre de compétitions. Mentalement comment elles se sentent. La vie de groupe... Nous, on a vécu tout ça ! Donc on sait comment ça se passe la vie de groupe pendant un mois. Même si chaque groupe est différent, forcément. On sait ce que les joueuses ressentent après un match, avant un match... On sait comment se passe une préparation de l'intérieur, sur une grosse compétition.

Je pense que c'est ce qu'on attend d'un consultant aussi. Au-delà de l'analyse technique, tactique, du jeu. On attend aussi ce passé de joueurs et de joueuses. Cette expérience qu'on a en tant que joueurs et joueuses dans ces grandes compétitions. Même si chaque joueuse est différente, on sait globalement ce que peut ressentir la joueuse. Les petits détails des préparations. Les petits détails de la vie de groupe.

C'est ce que les gens ont envie de savoir. Qu'eux ne peuvent pas savoir. Ils ne peuvent pas aller à l'intérieur. Ils ne peuvent pas être dans la tête des joueuses. C'est ce plus là qu'on amène. Bien sûr, il y a cette analyse technique et tactique, même si je pense qu'il y a des journalistes, même s'ils n'ont pas été joueurs de foot, ils sont totalement aptes à le faire. Il n'y a pas besoin d'être sportif de haut niveau parfois pour faire certaines analyses techniques et tactiques.

C'est vrai que l'on sent tout de suite l'apport des sportifs dans le monde des médias...

De toute façon, dans ce métier-là, l'un ne va pas sans l'autre. Le consultant a besoin du journaliste pour toutes les compétences qu'il a. Et je pense que le journaliste a besoin du consultant, pour toutes ces petites analyses-là et ces détails-là.