Le jour où... Jean-Marc Bosman a révolutionné le monde du football
Par Morgan Piot
L'ancien joueur du Standard de Liège est devenu célèbre suite à son litige qui l'opposait avec le RFC Liège au début des années 90, conduisant par la suite au fameux arrêt Bosman, qui a régi une grande partie du droit sportif européen en matière de transfert.
L'ex-international belge n'a pas marqué de son empreinte les annales du football pour ses performances sur le pré, mais bien pour son litige rendu célèbre au milieu des années 90. Tout a débuté par un contentieux de nature juridique avec son club contractuel, le RFC Liège (1988-1990) et la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) avec une date clé en perspective : le 15 décembre 1995.
Le droit communautaire à l'ordre du jour
En passe de s'engager avec Dunkerque en France, Jean-Marc Bosman reçoit avec stupeur le refus du RFC Liège de le libérer de son contrat (fin de contrat). Au regard du droit communautaire et du principe de libre circulation, le footballeur belge porte l'affaire devant la justice européenne où deux points cruciaux seront débattus.
Contestant la conformité des règles régissant les transferts, le natif de Liège réfute deux critères appuyées par la formation belge pour justifier cette opposition à un départ à Dunkerque. Le débat est alors posé par la CJCE sur deux problématiques alors pré-existantes en Belgique, contrairement à d'autres pays européens qui ont déjà abandonné la possibilité de réclamer une indemnité de transfert, pour un joueur en fin de contrat, mais également en marge des quotas de joueurs extra-communautaires limités au nombre de trois.
Déterminé à obtenir gain de cause, Jean-Marc Bosman remporte une bataille inespérée le 15 décembre 1995. Ce jour-là, la Cour de justice des Communautés européennes s'appuie sur deux fondements relatifs à la libre circulation et à la discrimination entre nationalités européennes. S'appuyant sur l'article 48 du traité de Rome, la CJCE donne raison à Jean-Marc Bosman.
Une portée internationale
Au-delà d'une victoire à l'échelle nationale, l'arrêt Bosman va considérablement changer la face du monde du sport dans son ensemble, que ce soit dans le milieu professionnel ou semi-professionnel (toutes disciplines confondues).
Établi comme une jurisprudence, l'arrêt Bosman incarne l'illégalité des quotas des sportifs extra-communautaires et des sportifs non communautaires pour les ressortissants d'États qui ont signé des accords d'association ou de coopération de l'Union européenne. De manière vulgarisée, les joueurs issus d'un État de l'Union Européenne peuvent librement circuler et être recrutés par un club également issu de l'UE.
Cette décision judiciaire inspirera dans le temps plusieurs litiges européens à l'image de l'arrêt Malaja (clause de non-discrimination entre la France et la Pologne) ou encore l'arrêt Kolpak (conditions de travail pour les ressortissants slovaques et russes en Europe). Depuis, 79 nations se sont conformées à l'arrêt Bosman (membres de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen).
Des conséquences économiques
En toute logique, cette portée juridique internationale a permis de faire sauter le clivage qui "différenciait" les joueurs, les clubs et les pays en matière de transfert.
Le bouleversement est visible au sein de nombreuses formations européennes qui s'appuient sur ces nouvelles dispositions juridiques pour bâtir des équipes compétitives sur la scène européenne. Cette situation sans précédent permet notamment au Real Madrid de s'offrir plusieurs footballeurs de classe mondiale en la personne de Luis Figo, Zinédine Zidane ou encore Ronaldo.
À l'inverse, l'arrêt Bosman sera décrié par de nombreux acteurs du ballon rond qui mettent en exergue une porte ouverte vers la libéralisation des capitaux, symbole d'une concurrence plus ou moins déloyale d'un point de vue sportif et économique. À titre d'exemple, Chelsea est devenu la première formation anglaise à ne pas aligner un seul joueur anglais dans son onze de départ. Une conséquence directe d'un système capitaliste qui fera cruellement défaut à d'autres secteurs de nouveau priorisés aujourd'hui, comme la formation des jeunes joueurs.