La carrière de Raymond Domenech en 10 actes

Raymond Domenech est le troisième sélectionneur le plus capé de l'histoire des Bleus (79 matches), derrière Didier Deschamps (108 matches).
Raymond Domenech est le troisième sélectionneur le plus capé de l'histoire des Bleus (79 matches), derrière Didier Deschamps (108 matches). / Stu Forster/Getty Images
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Personnage important du paysage footballistique français, Raymond Domenech a toujours été, depuis ses débuts même joueur, un personnage clivant. L'annonce de sa nomination en tant qu'entraîneur de Nantes fait jaser. Pour le meilleur et pour le pire, le Lyonnais a souvent revenu à la Une de l'actualité sportive lors des cinq dernières décennies.

1. L'heure du "Boucher"

Joueur, l'Hexagone prêtait à Raymond Domenech une réputation belliqueuse. Sa carrière a en effet basculé dès son premier match pro. Le 12 août 1970, L'Olympique Lyonnais d'Aimé Mignot affronte l'OGC Nice pour le premier match de D1 de la saison.

Au stade du Ray, Domenech découvre le haut niveau. Et un fait de match fondera à jamais le mythe. Sur une action personnelle, l'Autrichien Metzler dribble le jeune joueur de 18 ans puis subit, dans le mouvement, un tacle assassin de Jean Baeza. C'est pourtant Domenech qui se voit attribuer la faute qui blesse gravement l'attaquant aiglon. La presse s'enflamme : en un match, il devient "le boucher" du football français.

2. 1972 : 38 ans plus tôt, une première grève

Quand on évoque Raymond Domenech, on pense forcément au fiasco sud-africain. Des faits inédits, ou presque. Dans un contexte différent, il a lui aussi déjà fait grève en tant que joueur. En 1972, les joueurs du championnat français luttaient alors pour obtenir "le maintien de leur contrat à durée librement déterminé".

Menés par... Domenech, les joueurs sont allés jusqu'au Congrès de leur syndicat (UNFP) à Versailles pour obtenir gain de cause, face à des présidents de clubs qui voulaient reprendre eux-même en main les formules de contrats des joueurs. Finalement, le ministre des sports Joseph Comiti cède : la charte du football professionnel est ainsi rédigée à la suite de cet épisode.

3. 1973 : premiers pas à Clairefontaine

Deuxième sélectionneur le plus capé de l'histoire des Bleus (79 matches), Raymond Domenech a découvert la sélection en tant que joueur. Auréolé d'un sacre en Coupe de France avec l'OL en 1973, le jeune latéral gauche découvre à 21 ans l'Équipe de France.

Barré par une forte concurrence à ce poste (Bossis, Janvion...) Domenech ne dispute finalement que 8 matches sous le maillot Bleu entre 1973 et 1979. Mais son formidable engagement, à défaut de déployer de grands attributs techniques, auront marqué à leur manière le début du mandat de Michel Hidalgo à la tête des Bleus.

4. Le titre Strasbourgeois

Les années fastes de Raymond Domenech en tant que joueur se passent en Alsace. Après 7 ans à l'OL, il signe à 25 ans dans l'équipe dirigée par Gilber Gress. Adoubé par sa combativité et sa rigueur défensive, Domenech sera l'une des coqueluches du Stade la Meinau durant trois saisons.

Le titre de champion de France avec Strasbourg, le seul de l'histoire du club en 1979, reste l'un des souvenirs les plus marquants de sa carrière. Domenech dispute ensuite une saison au PSG (1981-1982), où il remporte la Coupe de France, avant de filer dans l'armada girondine (1982-1984), lui permettant de décrocher un deuxième sacre national.

5. Lyon, début d'une carrière d'entraîneur

Débarqué à Mulhouse (D2) en 1984, Domenech devient entraîneur-joueur, un statut en vogue à l'époque. Suivi avec attention par Jean-Michel Aulas, nouvel homme fort de l'OL, il revient finalement dans son club formateur en 1988, deux après la fin de sa carrière de joueur.

En un an, Domenech parvient à faire remonter le club en première division, et lors de la troisième saison, l'équipe retrouve l'Europe en terminant 5ème de l'exercice 1990-1991. Connu pour son gros caractère en tant que joueur, il a donc su parfaitement s'adapter au rôle de coach, amenant avec lui son leadership pour pouvoir briller en D1.

6. Les espoirs, l'antichambre

1993 est un tournant dans la carrière de Raymond Domeench. La fédération le désigne pour diriger l'équipe de France espoirs. Le Lyonnais restera finalement plus de 10 ans à ce poste, dirigeant tous les joueurs nés entre 1971 et 1981, ce qui inclue une partie de la génération dorée ayant fait le doublé Mondial 98-Euro 2000.

Malgré du talent, les sélections de Raymond Domenech ne s'imposent jamais comme des références mondiales ou continentales. L'Euro 2002, où figurent notamment Sydney Govou, Djibril Cissé, Philippe Mexès où Jean-Alain Boumsong, demeure son meilleur résultat à la tête des Bleuets : une défaite amère aux tirs au but face à la Tchéquie, en finale.

7. Sélectionneur, la consécration

Pressenti pour prendre la relève de Roger Lemerre en 2002, Raymond Domenech est finalement nommé à la tête de l'équipe nationale en 2004, malgré les candidatures de Jean Tigana et de Laurent Blanc. À 52 ans, Domenech découvre l'apothéose et la pression autour de ce rôle de sélectionneur des Bleus. Les débuts sont poussifs. Après deux échecs au Mondial 2002 et à l'Euro 2004, il doit relancer une équipe orpheline de plusieurs cadres champions du Monde et d'Europe (Zidane, Desailly, Thuram, Lizarazu)

Avec une nouvelle génération de joueurs (Abidal, Évra, Malouda, Cissé), ayant pour la plupart évolué sous ses ordres chez les sélections jeunes, il peine à faire gagner les Bleus, qui à mi-parcours des qualifications du Mondial 2006, pointent au 4ème rang de leur groupe. Le retour de Zidane, en août 2005, sera salvateur : la France se qualifie finalement grâce à deux derniers succès en Irlande et contre Chypre.

8. Une quête, Zidane et les autres

La France n'est jamais aussi dangereuse que lorsqu'on ne l'attend pas. Cette règle s'est encore vérifiée lors de la Coupe du Monde 2006. Malgré la présence de références mondiales (Thuram en défense, Zidane et Vieira au milieu, Henry en attaque), les tricolores, qui sous Domenech, ne présentent pas un jeu vraiment attractif, ne font pas partie des favoris de la compétition. Mais après deux nuls laborieux contre la Suisse (0-0) et la Corée du Sud (1-1), les Bleus se réveillent face au Togo (2-0) pour la qualification en 1/8.

Avant de se sublimer. L'Espagne, le Brésil et le Portugal sont tous mis au tapis par les Bleus d'un Zizou au sommet de son art. Son jubilé, ponctué d'une panenka et d'une exclusion violente, sera contrasté. La conclusion complètement ratée. L'Italie s'impose en finale aux tirs au but (t.a.b 5/3). En ratant de peu le sacre mondial, Domenech a malheureusement manqué la reconnaissance éternelle d'un public français qui depuis, ne lui réserve pas que des louanges.

9. Knysna

L'histoire entre Raymond Domenech et les Bleus se terminera mal. Incapable de sortir la France d'une poule relevée (Pays-Bas, Italie, Roumanie) à l'Euro 2008, le sélectionneur verra ensuite son nom à jamais lié à l'un des fiascos les plus célèbres de l'histoire du foot français.

En 2010, lors du Mondial, il se retrouve mêlé à un tourbillon d'événements prouvant qu'il pataugeait sévèrement à son poste sur la fin : le renvoi de Nicolas Anelka après l'avoir insulté lors de la mi-temps de Mexique-France (2-0), le boycott d'un entraînement par les joueurs, son refus de serrer la main au sélectionneur sud-africain lors de l'ultime défaite des Bleus, les privant de 1/8 de finale...Oui, les 79 matches de Domenech à la tête des Bleus (2004-2010) forment un étrange paradoxe, entre fabuleux et catastrophique.

10. Nantes, come-back inattendu

Raymond Domenech serrant la main à son capitaine Nicolas Pallois. Avec seulement 3 points d'avance sur la place de barragiste, le club est en danger.
Raymond Domenech serrant la main à son capitaine Nicolas Pallois. Avec seulement 3 points d'avance sur la place de barragiste, le club est en danger. / SYLVAIN THOMAS/Getty Images

Devenu depuis consultant pour Europe, l'Équipe ou RTL, Raymond Domenech a animé l'actualité sportive ces derniers jours. Le 26 décembre, le président nantais Waldemar Kita le nomme entraîneur du FC Nantes jusqu'à la fin de la saison 2020-2021.

Ainsi, Domenech retrouve une Ligue 1 totalement métamorphosée, 27 ans après son dernier match à la tête de l'Olympique Lyonnais. Ce choix du club, perçu comme un pari fou, ne doit pas détourner l'effectif de l'objectif principal : avec Domenech, les Canaris, 17èmes au classement, doivent aller chercher un périlleux maintien. Le technicien de 68 ans a pour l'instant obtenu deux nuls depuis sa nomination (0-0 face à Rennes et 1-1 contre à Montpellier).