Interview - Kai Wagner : "Je veux devenir le meilleur latéral gauche du monde"

Kai Wagner sous les couleurs du Philadelphia Union.
Kai Wagner sous les couleurs du Philadelphia Union. / Mitchell Leff/Getty Images
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Exilé aux États-Unis depuis 2019, Kai Wagner a changé de dimension en MLS. Prometteur latéral gauche peinant à exploser au haut-niveau à ses débuts en Allemagne, l'Allemand de 23 ans est aujourd'hui perçu comme l'un des meilleurs à son poste outre-Atlantique.

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90min, le joueur de Philadelphie est revenu sur sa jeune carrière, tout en nous confiant vouloir devenir "le meilleur du monde à son poste". Portrait.


Philadelphie a toujours été une terre propice à l'émigration des Allemands. Tout a débuté vers la fin du XVIIème siècle, où la capitale de la Pennsylvanie est devenue le refuge des Quakers et des Mennonites. Encore aujourd'hui, le célèbre quartier de Germantown, fondé en 1683, témoigne de cette omniprésence germanique.

Kai Wagner, arrivé en 2019 au nord-est des États-Unis, perpétue avec brio ce lien historique entre "Phili" et l'Allemagne. Brillant cette année sur les prés américains, le latéral gauche a contribué à la meilleure saison de l'histoire de Philadelphie, champion de sa conférence et favori au titre de MLS lors des play-offs qui se déroulent actuellement.

"Personne à Phili (Philadelphia, NDLR), n’aurait pu imaginer qu’on devienne champion de notre conférence. On a une grande équipe et une super philosophie."

Kai Wagner

Une année idyllique pour le défenseur de 23 ans, qui végétait en troisième division allemande il y a peu, et désormais perçu comme l'un des meilleurs joueurs de la Major League Soccer.

Des débuts prometteurs

Avant de naviguer vers l'Ouest, Kai Wagner a débuté son périple au pays, du côté du modeste club du SSV Ulm 1846. "J’ai rejoint Ulm en U12 où j’ai joué pour toutes les catégories jeunes", précise Wagner. Très vite, son talent et ses ambitions, déjà débordantes, le mènent à tenter sa chance au sein d'un club de l'élite allemande.

"Après sept ans au club, j’ai tenté ma chance dans une équipe U19 de Bundesliga à Augsbourg. Je ne suis resté qu’une demi-saison car c’était compliqué pour moi entre les blessures et d’être aussi loin de ma famille. Je suis alors retourné à Ulm pour jouer avec les seniors. Ils avaient pour projet de monter en quatrième division en me promettant un rôle clé."

En D5 allemande, lors de la saison 2015-2016, le jeune latéral se forme et brille dans un championnat où le niveau physique éclipse souvent les prédispositions techniques. "On a réalisé une grosse saison avec un super coach. De mon côté, j’ai délivré 13 passes décisives et attiré le regard de Schalke."

L'impasse en D3 allemande

Référence du football allemand, le club de la Ruhr constitue une opportunité en or pour le joueur alors âgé de 20 ans. "Schalke, c’était une opportunité rêvée à cet époque pour un joueur de mon âge. J’ai juste joué avec la réserve et on a eu une saison compliquée mais j’ai réalisé une bonne saison."

"Très jeune, j’ai beaucoup changé de clubs sans jamais réussir à m’y installer. Je me suis finalement imposé à Wüzburger en troisième division allemande."

K. W.

Évoluant en Regionalliga West, la Bundesliga avec l'équipe fanion du club de la Ruhr, est alors un mirage plus qu'un réel horizon. "De là, Wüzburger s’est intéressé à moi car leur coach était l’ancien entraîneur des U18 de Schalke. Il m’a convaincu de le rejoindre", se remémore-t-il. 

Exit l'équipe réserve de Schalke, il prend le pari de la 3. Liga, nom donné à la D3 allemande avec les Würzburger Kickers. "Les débuts ont été compliqués, j’ai eu du mal à m’imposer. Puis un nouveau coach est arrivé et j’ai démontré que j’étais le meilleur latéral gauche du club. Après j’ai toujours été titulaire."

Deux saisons pleines et 40 rencontres de 3. Liga plus tard, Wagner est alors prêt à franchir un palier.

"Avec le club, on a eu des différends sur le renouvellement de mon contrat. Je voulais jouer à un meilleur niveau mais ils voulaient me conserver", précise-t-il. Une impasse temporaire, qui lui ouvre finalement les portes de la MLS.

The American Dream

"J’ai eu des opportunités pour signer en Bundesliga.2 (deuxième division allemande, NDLR), mais ces clubs ne m’ont pas convaincu. Dès lors, j’ai commencé à parler avec des clubs américains."

La plus allemande des villes américaines devient alors une évidence. "Tout de suite Philadelphia s’est intéressé à moi, notamment le directeur sportif qui est Allemand (Ernst Tanner, NDLR) et qui connaissait bien mon profil. Nos échanges se sont très bien passés. Ils voulaient construire une équipe qui correspond à mon style de jeu. Le contrat est arrivé et ça m’a semblé une évidence. Ça a toujours été un rêve de jouer dans un championnat étranger."

La nouvelle recrue ne tarde pas à se mettre en évidence. En 2019, il délivre 8 passes décisives en 30 rencontres de championnat et bluffe le pays du Soccer par ses qualités : "J’ai un très bon pied gauche et je sais que c’est une denrée rare dans le football. Je suis un défenseur qui se projette vers l’avant et agressif sur le porteur. J’aime participer au jeu et délivrer le maximum de centres."

"Partir aux États-Unis est la meilleure décision de ma carrière pour l’instant. Maintenant je constate que la MLS est l’étape parfaite pour ma progression."

K.W.

Cette année, son équipe marche sur l'eau. Malgré les blessures, le latéral de 23 ans a grandement contribué au titre de champion de conférence des siens.

"Dès le début de saison, j’avais à l’esprit de remporter la MLS cette saison, nous a-t-il affirmé avec assurance. À mon sens ,on a la meilleure équipe. On est invaincu à domicile cette saison, et on va jouer tous nos matchs de play-offs chez nous. C’est un énorme avantage."

Devenir le meilleur latéral gauche du monde

De la D3 allemande à l'un des joueurs les plus respectés de MLS, l'ascension de Kai Wagner semble inexorable. Et il en a conscience :

"Mon état d’esprit, c’est que rien ne peut m’arrêter. Si je reste fit, je peux faire partie des meilleurs. C’est mon but. Je veux devenir l’un des meilleurs du monde à mon poste (latéral gauche). "

K. W.

"Je ne veux pas seulement prouver ma valeur aux autres, mais me prouver à moi-même, ajoute-t-il. Pour l’instant, je sors de deux très bonnes saisons en MLS. Je suis sur la bonne voie."

Un retour en Europe ?

Une voie qui devrait rapidement le ramener sur le Vieux Continent.

"Revenir en Europe ? Absolument ! Mon objectif est de devenir le meilleur possible et pour ça, il faut évoluer en Europe."

K.W.

S'il rêve ouvertement et légitimement de Bundesliga et suscite la convoitise de Fulham et West Ham en Premier League, le prodige de Philadelphie n'écarte pas l'idée d'évoluer en Ligue 1 :  

"Je n’ai encore jamais été en contact avec un club de Ligue 1, mais c’est un championnat qui me plairait, au même titre que l'Espagne. Je sors de la troisième division allemande, donc je n’ai sûrement pas attiré leur attention. Mais maintenant que je me suis imposé en MLS, j’espère qu’ils me connaissent."

Le message est certainement passé.