Grandeur et décadence de l'ère Andrea Agnelli à la Juventus

Andrea Agnelli est le président le plus titré de l'histoire de la Juventus
Andrea Agnelli est le président le plus titré de l'histoire de la Juventus / Emilio Andreoli/GettyImages
facebooktwitterreddit

Ce mercredi 18 janvier marque la fin de l'ère Andrea Agnelli. La Juventus change officiellement de président aujourd'hui : passation de pouvoir à Gianluca Ferrero. Durant ces 12 ans de présidence, la Vieille Dame aura connu de beaux comme des moments difficiles. 90min revient aujourd'hui sur le passage du président le plus titré de l'histoire du club bianconero.

Le 19 mai 2010, Andrea Agnelli prend une Juventus en totale perdition, les 4 575 jours suivants appartiennent à l'histoire. La Juve post-calciopoli voit enfin le jour. 9 scudetti de suite seront remportés par sa Vecchia Signora, un exploit qui semble aujourd'hui impossible à répéter.

Sans oublier 5 Coupe d'Italie, 4 Supercoupe d'Italie, 2 finales de Ligue des Champions ainsi que 5 Serie A féminine. Un total de 19 trophées, ce qui fait de lui le président le plus titré de l'histoire du club bianconero.

Une présidence Andrea Agnelli globalement réussie

Andrea Agnelli est celui qui a permis à la Juventus de redevenir la meilleure équipe d'Italie et de ramener son club au premier plan sur la scène européenne. Quand il reprend son club de cœur, la Juve n'a plus gagné de titre depuis plus de 5 ans, l'effectif est vieillissant et en manque d'idées.

Il va donc au fil des années remettre son club sur le droit chemin, sur le sportif mais aussi sur l'aspect économique. De façon globale, son entreprise cotée en bourse va suivre une valorisation financière assez impressionnante durant ces 12 années jusqu'à atteindre 1,597 milliard d'euros en 2022 : soit le 10ème club avec la meilleure évaluation économique en Europe, évidemment large leader en Italie.

Un état économique instable à la Juventus à l'arrivée d'Andrea Agnelli

Lors de prise de pouvoir en juillet 2010, Andrea Agnelli prend en main une société avec un chiffre d'affaire de 219 millions d'euros et un résultat net dans le rouge d'environ 13 millions d'euros. Il va alors construire son hégémonie économique principalement autours de Fabio Paratici (le directeur sportif) et Beppe Marotta (le CEO).

Tifoso avant de devenir président, il va bâtir ses succès avec l'une de ses plus grandes satisfactions : l'inauguration de l'Allianz Stadium en 2011. Au fil des années, le chiffre d'affaire de la Vieille Dame ne va cesser d'augmenter pour atteindre 621 millions d'euros en 2019 : cette équipe va devenir un véritable modèle en Italie et en Europe, basé sur la souveraineté économique.

Parce que si sur le plan sportif la Juventus est redevenue très compétitive, c'est parce qu'Andrea Agnelli et ses collègues ont su devenir très malins sur le marché des transferts avec des coups intelligents, souvent peu onéreux, les fameux paramètres zéro : Pogba arrivé gratuitement puis vendu 105M€ à Manchester United en 2016.

Les transferts gratuits de Pirlo, Khedira, Coman, Dani Alves et ceux qui n'ont quasi rien couté comme Barzagli. Mais la Juve sait aussi dépenser lorsqu'il faut sortir le chèque, notamment pour le transfert de Gonzalo Higuain (90 millions d'euros).

L'arrivée de Cristiano Ronaldo en 2018 le coup de maître d'Agnelli

Durant son ère à la Juventus, Andrea Agnelli a connu de très grands joueurs mais son plus gros coup s'appelle Cristiano Ronaldo en juillet 2018. Le président bianconero a été l'un des principaux artisans de cette opération de mercato de 100 millions d'euros : il ira notamment en Grèce sur le lieux de vacances de CR7 pour discuter avec sa future recrue.

Cristiano Ronaldo
Cristiano Ronaldo a révolutionné la Juventus / Nicolò Campo/GettyImages

À ce moment là, le fils d'Umberto Agnelli envoie un message à la planète football. Le plan est clair, continuer à avoir une hausse de la visibilité au sein de son club mais surtout enfin remporter la Ligue des Champions après deux échecs en finale (2015 et 2017). C'est tout naturellement que la "marque Juve" va exploser au niveau mondial lors de la saison 2018/19 avec des revenus publicitaires et de sponsorings à hauteur de 108 millions d'euros et un merchandising qui s'élève à 44 millions d'euros pour un total de 152 millions d'euros : une hausse de 33% par rapport à la saison précédente.

Au final, le futur nous apprendra que CR7 aura répondu présent avec 101 buts en 134 matchs, mais que jamais son club n'aura su le mettre dans les bonnes conditions. Un véritable échec collectif pour la Vecchia Signora. Une victoire commerciale certes, mais une défaite sportive non négligeable.

Une fin de présidence critiquable

Les dernières années d'Andrea Agnelli à la tête de la présidence de la Juventus se sont avérées compliquées. Il est clair que les résultats sportifs et économiques de son équipe sont en baisse depuis 2020. La Juve va d'ailleurs boucler la saison 2021/22 sans remporter le moindre trophée, une première depuis l'exercice 2011/12.

Des résultats sportifs en baisse et l'impact négatif du COVID

Mais cette régression sur le plan sportif peut notamment s'expliquer par une politique de recrutement hasardeuse : des salaires XXL à des joueurs arrivés gratuitement (Ramsey est le cas le plus récent), des échanges inexplicables sur le plan sportif comme celui entre Danilo et Cancelo en 2019. Pour faire simple, au fil des années, les mauvaises décisions ont porté la Vecchia Signora à une augmentation exagérée de la masse salariale.

Malheureusement pour la Juve, le COVID est passé par là et le bilan financier n'a pas été épargné. Le bilan comptable 2020/21 se clôture avec une perte historique de 209 millions d'euros, ainsi qu'une baisse des revenus du club de 16% qui peut notamment s'expliquer par la fermeture des stades.

C'est tout naturellement que les pertes ont augmenté sur le bilan 2021/22 : - 254 millions d'euros. En bref, Agnelli a su redresser son club année après année mais le COVID et les erreurs sportives cumulées à partir de 2019 ont joué un rôle central dans les pertes économiques importantes qu'a subi la Juventus.

General view shows Allianz Stadium prior to the Serie A...
Le Covid a impacté la Juventus et l'ensemble de la Serie A / Nicolò Campo/GettyImages

Des choix d'entraineurs négatifs

En 2011, Andrea Agnelli donnera les clés de son effectif à Antonio Conte pour tenter d'amener la Juventus là où elle doit être. Pari gagnant avec 3 scudetti de suite et la participation à la Ligue des Champions retrouvée, dont un quart de finale lors de la saison 2012-2013. Puis ce sera autour de Massimiliano Allegri de 2015 à 2019 avec notamment 2 finales de Champion's en 3 ans, les choix du président de la Juventus portent leurs fruits. Mais c'est à partir de 2019 que les choses vont peu à peu se compliquer avec des choix loupés.

Maurizio Sarri, puis Andrea Pirlo seront remerciés une saison après leur arrivée : l'instabilité sur le banc de touche de la Juventus se fait récurrente, quelque chose d'inédit depuis l'arrivée d'Agnelli à la tête des Bianconeri. Les deux coachs représentent des idées et principes de jeu totalement différents de Massimiliano Allegri mais la Juve commencera à moins gagner (3 titres en 2 saisons), Agnelli va donc prendre une décision drastique : faire revenir le technicien toscan lors de l'exercice 2021/22.

Il décide en premier lieu d'accorder une deuxième chance au Mister Allegri en lui offrant un salaire important et un contrat de 5 ans. Un choix qui s'annonce pour le moment décevant. Pour la première fois depuis 2011/12, la Vieille Dame n'a pas remporté le moindre trophée. L'échec du retour d'Allegri est aussi celui d'Agnelli.

Andrea Agnelli : grand artisan de la Superleague

Impossible, enfin, de parler d'Andrea Agnelli sans évoquer la Super League. Un projet de compétition qui prévoit l'adhésion de 12 grands clubs européens, dont la Juventus, le Real Madrid et le FC Barcelone. Le président de la Vieille Dame en est l'un des grands partisans - presque initiateur -, accompagné par Florentino Perez. Un championnat voué à concurrencer la Ligue des Champions, et donc le système actuel de l'UEFA.

Le projet a un but sportif mais aussi économique : générer le plus d'argent en dépendant le moins possible de l'aspect sportif alors la crise sanitaire a frappé le monde du football et créer "une industrie durable qui offre la stabilité". Encore aujourd'hui, le natif de Turin continue à sa battre pour que le projet puisse voir le jour. Un des projets qui mènera à sa chute.

En ce 18 janvier 2023, l'ère Andrea Agnelli prend officiellement fin. Place à l'installation du nouveau Conseil d'Administration de la Juventus avec au pouvoir Gianluca Ferrero (le président) et Maurizio Scanavino (le directeur général).


Écoutez Top 90, l’émission de 90min dans laquelle on débat foot sous forme de top listes ! Rankings, XI combinés, Frankenplayer, à chaque épisode nos avis pour établir à la fin la liste ultime. Dans ce nouvel épisode avec Sara Menai, Davy DiamantQuentin Gesp et Alexis Amsellem, on se demande qui doit prendre la succession de Hugo Lloris avec le brassard des Bleus ! Cliquez ici pour vous abonner au podcast